25 NUANCES DE DOC

ON THE LINE, les expulsés de l’Amérique

Mardi 19 janvier à 00.35



 

A Tijuana, des milliers de mexicains sont expulsés chaque année des Etats-Unis. Certains ont vécu plusieurs dizaines d’années de l’autre côté de la frontière, travaillé, payé des impôts, fondé une famille. Des pères et mères de familles résidant aux États-Unis depuis des décennies se retrouvent ainsi séparés de leurs enfants.
Cette ville-frontière est devenue un sas entre deux mondes où échouent les vies brisées des migrants. Au sud du mur, les chemins de la reconstruction sont sinueux et la spirale de l’exclusion impitoyable pour les expulsés de l’Amérique.

 

A l'opposé de la posture affichée, l'Amérique n'expulse plus en priorité que les criminels étrangers - ces " bad hombres" pointés du doigt par Donald Trump pour justifier une politique de tolérance zéro contre l'immigration illégale mexicaine. L’administration est tenue de faire du chiffre. Les travailleurs illégaux qui ont passé la plus grande partie de leur vie aux Etats-Unis, et dont les enfants sont citoyens américains, sont désormais également ciblés.

C’est ce retour forcé qui constitue la trame du film, avec ce qu’il comporte de violence, d’épreuves, de traumatismes. Il s’agit de suivre le parcours personnel de trois expulsés, au plus près de leurs sentiments, depuis leurs retour sur le sol mexicain après des années d’exil. Dans ce périple  s’immisce le quotidien bouleversé de leurs familles restées de l’autre côté de la frontière. Aux Etats-Unis elles doivent continuer à vivre, privées d’un père, d’une mère, d’un compagnon. Leur quotidien, frappé par une décision administrative, ne sera plus jamais le même.

ON THE LINE, les expulsés de l’Amérique  fait le récit intime d’une réalité géopolitique. Le film raconte l’histoire actuelle d’une frontière qui bouleverse des destins, écartèle des familles et qui s’inscrit durablement dans la chair et les esprits. 
 

 

NOTE D'INTENTION DE LEO MATTEI et ALEX GOHARI- Réalisateurs

 

Ce film est le prolongement naturel de notre travail sur la migration en Amérique centrale. Avec ON THE LINE, les expulsés de l’Amérique, nous souhaitons interroger la violence du processus d’expulsions massives mené par l’administration américaine. La frontière entre Etats-Unis et Mexique y tient en quelque sorte le rôle principal : comment une mince ligne de démarcation qui semble si arbitrairement posée au milieu du paysage peut-elle avoir de telles conséquences sur des vies humaines ?

Depuis 5 ans nous vivons au Mexique et nous arpentons la frontière désertique qui sépare ce pays des Etats-Unis. Nous avons dû nous rendre à l’évidence : le profil des nouveaux expulsés de l’Amérique ne correspond en rien à la figure des « bad hombres », ces criminels étrangers pointés du doigt par Donald Trump pour justifier une politique agressive envers les immigrants.

Les expulsés que nous avons rencontrés sont des exilés dans leur propre pays. Beaucoup ne sont mexicains que de naissance : une femme expulsée après avoir travaillé 30 ans au Texas, loin de ses enfants, nés citoyens américains ; un homme expulsé après des années dans les prisons californiennes, pur produit des ghettos de Los Angeles ; un vétéran de l’armée américaine qui survit désormais dans une piaule de Tijuana…

La première de ces rencontres fut décisive : Martha, 45 ans, venait d’être expulsée, elle était désemparée, terrorisée. Elle s’agrippait, tremblante, à son téléphone portable américain, seul vestige de sa vie d’avant dont elle serait dorénavant séparée par l’une des frontières les plus gardées au monde. Elle s’exprimait en anglais, la voix étranglée par les sanglots, avec sa fille ainée à l’autre bout du fil, de l’autre côté de la frontière. La fille ainée de Martha est citoyenne des Etats-Unis, et soldate dans l’armée américaine… Mais cet engagement n’a pas empêché l’expulsion de sa mère. Le sentiment d’injustice est immense. Au téléphone la discussion portait sur la manière d’annoncer à sa plus jeune sœur, encore enfant, le départ de sa mère. Comment expliquer sa disparition ? Comment expliquer que sa mère ne vivrait plus à ses côtés ? Comment expliquer qu’une décision politique les séparerait, peut-être à jamais ? La violence de cette scène de déchirement, ce tableau humain avait quelque chose d’immédiat. A travers leur douleur, nous appréhendions sans filtre la violence d’une politique migratoire.

Le soir même de notre rencontre, Martha est montée dans un autobus pour rejoindre le sud du Mexique. Nous ne l’avons jamais revue. Pendant plusieurs mois nous nous sommes posés les questions suivantes : qu’est-elle devenue ? Maintient-elle un lien avec ses enfants ? Comment s’adapte-t- elle à un pays qui n’est plus le sien ?
De cette rencontre avec Martha en ont suivi d’autres, toujours fortes. Nos repérages avec ces premiers personnages, le choc de leur récit, nos échanges, ont peu à peu infusé en nous, au point de vouloir en faire un film.
Parmi les personnes rencontrées lors de nos séjours à la frontière, nous nous sommes intéressés plus particulièrement à trois d’entre elles : Rocío, Sergio et Richard, dont les histoires personnelles illustraient de manière singulière la spirale de l’exclusion, de l’effacement qui touche les expulsés, et l’errance à laquelle ils sont condamnés, celle-là même que notre film se propose d’explorer. Les trajectoires de Rocío, Sergio et Richard ont évidemment un caractère unique mais elles entrent en résonance avec le profil de très nombreux expulsés. 

Plus qu’une analyse, une dissection de la machine judiciaire, des rouages du système d’expulsion, nous voulons faire la photographie subjective, sensible, d’une tragédie, à un point précis de son histoire, sur cette ligne de démarcation entre deux pays, deux mondes.

A la rengaine politicienne qui vise à stigmatiser les immigrants comme des « mauvais hommes », des criminels étrangers venus troubler la paix américaine, nous opposons une réalité humaine. Depuis l’élection de Donald Trump, les victimes de la politique d’expulsion des Etats-Unis ont vu leur visage changer et sont bien souvent des immigrants installés de longue date, arrivés enfants aux Etats-Unis et qui y ont fondé familles et foyers.

Il ne s’agit cependant pas pour nous de présenter les expulsés comme des « good hombres » à tout prix ; nous ne répondons pas au jugement moral par une autre vision moralisatrice. Si certains des expulsés ont un passé criminel, nous ne comptons pas l’éluder, mais bien montrer à quel point leur identité, leur criminalité elle-même, est un pur produit de l’Amérique.
Il s’agit de mettre en évidence le fait que les Etats-Unis ne rejettent pas seulement au Mexique des travailleurs, des « bons » pères ou mères de familles, mais aussi leurs propres délinquants, tout aussi intégrés à la société américaine et dont l’évolution criminelle est issue de ses ghettos ou de son système carcéral.

Au départ de ce film, il y a donc des histoires intimes. Il y a la violence froide, administrative d’une politique vécue dans la chair. Il y a des destins bouleversés, des familles écartelées. Dans nos précédents films et reportages, nous n’avions pu qu’effleurer ces histoires mais déjà, à travers elles, ressentions la brutalité du processus d’expulsion. Tenus par le temps médiatique, l’irruption d’un chiffre qui fait la une, une énième déclaration politique qui agite un moment la frontière, nous avions le sentiment de passer à cöté de l’essentiel.

Avec ON THE LINE, les expulsés de l’Amérique, nous voulons nous arrêter sur ces histoires, leur donner un visage et une voix. Car dans les destins brisés par cette frontière réside une tragédie de notre temps. Il y a là, nous en sommes convaincus, la nécessité de faire un film.


 

 

 

Quartier impopulaire

 

 

25 NUANCES DE DOC

France 2 est fière de proposer pour une troisième saison l'espace documentaires : « 25 nuances de doc » ! Ce rendez-vous propose chaque mardi des films uniques, français, européens ou d’ailleurs, des films inédits ou des grands classiques. Son ambition est de mettre en avant le cinéma documentaire, avec des œuvres singulières et fortes, pour donner à voir un monde tout en nuances.

 

25 nuances


68'

 

Un film de  
Léo Mattei et Alex Gohari

 

Une production
Brotherfilms 

 

Producteurs
Emmanuel François et Alice Mansion 
 

Avec la participation
de France Télévisons et de Public Sénat 

Avec la participation du CNC et le soutien de la PROCIREP - ANGOA

 

Montage
Matthieu Besnard 

 

Musique originale
Antoine Berjeaut 

 

Image
Léo Mattei
 

Pôle Société & Géopolitique France Télévisions
Renaud Allilaire
David Amiel

 

Directrice de l'unité documentaires de France Télévisions
Catherine Alvaresse 
 

----------------------------------

Le documentaire est disponible en visionnage sur
https://www.francetvpreview.fr/ 

 

et en replay pendant 60 jours sur
https://www.france.tv/france-2/25-nuances-de-doc/

Contacts presse

Florence Alexandre
Contact - Anyways
Pictogramme francetvpro
Pictogramme Phototélé
Pictogramme France.tv Preview
Pictogramme Instagram france 2