« On a tous une part de campagne en nous » : entretien avec Pierre Coré

Auteur et showrunner de « Partie de campagne »
Disponible dès le 20 mars sur Okoo

Dans cette interview, Pierre Coré nous emmène à la campagne, où vivent les quatre héros Raphaël, Lina, P’tit Pied et Grande Perche. Il partage avec nous son approche de la narration visuelle et les défis qu'il a relevés pour donner vie à cet univers animé. 

Partie de campagne, disponible dès le 20 mars sur Okoo. 

 

Comment est née cette série animée ? 

Nous nous sommes un peu inspirés, avec Franck Samuel (co-créateur, ndlr) de la célèbre Guerre des boutons, qui a laissé en chacun, lecteur ou spectateur, un souvenir tenace. Sur les conseils de France Télévisions, nous avons ancré davantage la série dans le monde d’aujourd’hui et nous avons allégé l’opposition entre les clans. Nous avons entrepris d'explorer la vie des enfants d'aujourd'hui à la campagne, en nous concentrant sur ce qu'ils font après l'école. Nous avons élaboré une trame narrative autour d'une “bande” d'amis, unis par les liens solides de l'amitié, dont on explore intensément  les émotions et les sentiments.
 

Pouvez-vous nous parler du titre, Partie de campagne

Lorsque j'ai tenté de résumer cette série, je me suis rendu compte qu'elle était davantage une chronique du quotidien qu'une succession d’aventures. C'est alors que j'ai songé à Renoir et à sa célèbre Partie de campagne, qui évoque parfaitement l'ambiance paisible et bucolique de la série : un petit morceau de campagne sans prétention, en contraste avec le tumulte du monde moderne. 
 

Quelles ont été vos inspirations pour les différentes histoires et les personnages ? 

J’ai puisé en grande partie l’inspiration dans mes propres souvenirs pour créer ce dessin animé. Quand j'étais enfant, je passais toutes mes vacances d'été dans la ferme de mes grands-parents dans l’Yonne. Tous les ans, c’était les mêmes petits voisins, les mêmes balades à vélo, les mêmes ruisseaux et forêts... Je pense que beaucoup de gens peuvent se reconnaître dans ces moments simples, car ils sont mémorables. 

Les scénaristes, eux aussi, ont vu leurs souvenirs d’enfance se raviver pendant les séances de travail. En fait, nous avons tous une part de campagne en nous, même si la plupart d'entre nous sont urbains. La France est un pays agricole, et les gens ont tous une expérience de la campagne à partager, quelque chose à raconter à ce sujet.
 

Comment avez-vous dessiné leur personnalité et leur apparence ? 

Pour “dessiner” les personnages, je me suis inspiré de mes enfants, de ceux de mon entourage et même de mes propres sœurs ; tous ont contribué à la création des différents caractères de Partie de campagne. Les vacances en famille ont aussi été une source d'inspiration majeure, car pendant ce laps de temps limité, les enfants doivent apprendre à se connaître et à devenir amis. J'aime les observer, écouter leur langage, suivre leurs interactions et voir comment, par exemple, ils gèrent l'arrivée d'un nouveau copain. Ainsi, j'ai puisé dans tout mon vécu pour créer des personnages qui sont, j’espère, à la fois uniques et authentiques.
 

Comment avez-vous travaillé avec les acteurs des voix off pour donner vie à vos personnages ?  

Lors de la création d'un dessin animé, il est important de travailler avec des comédiens de doublage pour donner vie aux personnages. Je leur parle beaucoup des histoires et des caractères pour chercher la sincérité plutôt que le sensationnel ou le remplissage d’écran. Chaque personnage est interprété selon sa personnalité. Par exemple, on a cherché avec la comédienne qui joue Grande Perche comment interpréter son côté très énergique à travers sa voix. 

Pour certains rôles, comme P'tit Pied, Samson et Le Lièvre, l'utilisation de voix d'acteurs adultes semblait caricaturale et inappropriée, comme une partition qui sonne faux. Alors, j’ai insisté pour qu’ils soient joués par des enfants afin de donner une sincérité et une crédibilité à leur interprétation. D’ailleurs, le pré-enregistrement de la voix de l'acteur qui incarne P’tit Pied, doté d'un phrasé particulier, a constitué une aide précieuse pour l'équipe d'animation. Ils ont pu ajouter des détails dans le regard, qui renforce son expressivité, et qui le rend plus réaliste et cohérent. 

 

Vous êtes créateur et showrunner de la série. Quels ont été les plus grands défis auxquels vous avez été confronté en créant et en dirigeant cette série ? 

En fait, la création d'une série de 52 épisodes en 3D a été un défi en soi.

J'ai travaillé en étroite collaboration avec le réalisateur, Romain Borrel, pour créer une série animée de qualité. Comme je suis responsable à la fois de la direction artistique, de l'écriture, du doublage et de la pré-production, chaque étape du processus représentait un défi en soi. Mais la collaboration avec chacun et une vision claire nous ont permis de créer une série de qualité sans difficultés. 

Et techniquement, j’avais un petit défi ! J’ai insisté pour que les feuilles des arbres bougent, car je trouvais que cela embellissait l'expérience visuelle et permettait de donner vie à la nature comme un personnage à part entière. 

 

Quelle est votre partie préférée dans le processus de production de dessin animé ? 

Travailler avec les comédiens est une expérience incroyable. 

J'adore aussi le moment où les personnages prennent vie à travers les premières animations, où leurs voix et énergies prennent forme. C’est là que tout prend sens. 

De même, j’aime énormément l'écriture, surtout lorsque je peux travailler avec d'autres scénaristes. C'est toujours fascinant de voir comment chaque personne apporte sa propre vision de l'univers que nous avons créé ensemble.

 

Quels sont les éléments-clés d’une bonne histoire pour une série animée telle que celle-ci ? 

Les personnages sont les véritables clés de voûte de toute bonne histoire. Ils sont essentiels pour éveiller l'empathie du public. En effet, leur personnalité et leurs traits de caractère permettent aux spectateurs de s'identifier à eux, de les comprendre et de les apprécier – ou de les détester, selon les cas. Ils deviennent alors de véritables compagnons de route pour le public. Au quotidien, lorsque l'on suit une série ou un film en plusieurs épisodes, c'est bien souvent l'attachement aux personnages qui maintient l'intérêt et la curiosité du spectateur. 

En tant qu'auteur, je cherche sans cesse à leur donner vie en leur donnant une profondeur émotionnelle afin qu'ils restent mémorables et marquants. 
 

Si vous pouviez être l’un des personnages, qui choisiriez-vous et pourquoi ? 

Je suis un peu Raphaël, qui rêve d’aventure, même s’il est un peu trouillard. Il est un peu timide, amoureux sans oser le dire. Il est aussi très loyal en amitié. 
 

Si vous pouviez vivre dans l’univers de votre série, pendant une journée, que feriez-vous ? 

Je passerais, pour sûr, une bonne journée dans la cabane !
 

Des mesures ont-elles été prises pour réduire l’impact environnemental de la production de ce dessin animé ? 

Pour minimiser l'impact environnemental et rendre les images plus économiques et plus rapides à produire , l'équipe de production a optimisé l'utilisation des machines et allégé les polygones. L’équipe de production a profité des avancées technologiques, notamment en matière de cartes graphiques, pour améliorer l'efficacité énergétique. En fin de compte, ces efforts ont permis à l'équipe de terminer la série en limitant la consommation électrique, tout en offrant une qualité d'image élevée en un temps de production raisonnable. 
 

Si vous deviez choisir une chanson pour le générique de votre série, quelle serait-elle et pourquoi ?

« À bicyclette », d’Yves Montand. Pour son rythme joyeux, sa douce nostalgie et ses paroles qui fleurent bon la campagne et la bande de potes. 

“Puis on se roulait dans les champs 

Faisant naître un bouquet changeant, 

De sauterelles, de papillons, 

Et de rainettes.”