Interview de Dominique Verdeilhan

« Justice en France », nouvelle série-événement portée par les régions

Il a été l'un des visages de la justice pour France Télévisions, journaliste et chroniqueur judiciaire, ancien rédacteur en chef adjoint de France 2, Dominique Verdeilhan présentera mercredi 19 octobre la nouvelle émission Justice en France. Grâce à ces 52 minutes en immersion au cœur de la justice du quotidien dans tous les territoires, les Françaises et les Français vont découvrir ou redécouvrir la réalité du fonctionnement des tribunaux.

Justice en France est une grande première. Pouvez-vous nous expliquer le concept de cette émission totalement nouvelle ? 

L’idée est de faire entrer le téléspectateur dans les salles d'audience. Non plus par l'intermédiaire de séries et de fictions ou par des procès médiatiques, mais par la justice telle qu'elle se déroule au quotidien, dans la réalité des tribunaux. Par exemple, on découvre une petite fille qui souhaite être adoptée par sa grand-mère ou l’histoire d’un homme en récidive de conduite en état d’ivresse. Comme l’a indiqué la Chancellerie, il ne s’agira pas d’une justice-spectacle, mais d’une justice d’explication. Nous faisons le choix de la pédagogie et du décryptage. Toutes ces séquences seront entrecoupées d’interventions en plateau. 

Comme l’a indiqué la Chancellerie, il ne s’agira pas d’une justice-spectacle, mais d’une justice d’explication.

Comment une telle émission a-t-elle été mise en place ? 

Il a fallu attendre que la loi et le décret d'application soient votés, puis que la convention entre la Chancellerie et France Télévisions soit signée. En termes de production, il y a eu un cahier des charges très précis à respecter. L’accord de toutes les personnes et la fin des recours étaient notamment nécessaires avant le début de la diffusion. 

Justement, y a-t-il des précautions prises pour filmer les procès ? 

L’anonymat total des personnes est strictement respecté. Il ne s'agit pas de les identifier ; aucun nom des personnes qui apparaissent dans les procès n’est cité. De plus, tout est flouté pour qu'on ne les reconnaisse pas, sauf s'ils ont donné leur accord. 

Il y a déjà eu des procès filmés en France… 

En France, les procès ne sont plus filmés depuis 1954, depuis le célèbre cas Gaston Dominici, condamné pour meurtres. Cette affaire avait créé tellement de remous que la loi a été changée pour interdire la captation dans les tribunaux. Il était donc seulement autorisé de filmer les ouvertures de procès, avec évidemment l’accord des concernés. Puis, la loi Badinter en 1985 a autorisé le tournage dans les tribunaux pour les procès historiques, avec la restriction importante de ne pas les diffuser avant un certain délai. Parmi eux : ceux de Klaus Barbie, Maurice Papon ou encore les attentats du 13 novembre 2015 à Paris… C’est donc la loi du garde des Sceaux Éric Dupont-Moretti, le 17 décembre 2021, qui a de nouveau permis, avec l’accord des concernés et en respectant un cahier des charges strict, de filmer des procès et de les diffuser lorsque l’affaire est considérée comme close. 

Avec cette série documentaire, portée par le réseau régional de France 3, va se dessiner une cartographie complète de la justice en France rurale et urbaine… 

Effectivement, pour cette première édition, nous avons commencé par filmer des affaires de délinquance quotidienne ou civiles à la cour d'appel d'Aix-en-Provence et à Grasse, dans les Alpes-Maritimes. Au fur et à mesure de cette série, les affaires seront différentes. Nous irons dans d'autres palais de justice, peut-être en région parisienne ou dans le centre de la France, où d’autres affaires seront traitées : correctionnelles, prud'homales... L'objectif est d’être le plus complet possible.

La loi pour la confiance dans l’institution judiciaire insiste sur l'aspect « d’intérêt public, d’ordre pédagogique, informatif, culturel ou scientifique ». Comment voyez-vous ici votre rôle ?

Mon rôle reste celui que j'ai toujours eu pendant mes 33 ans de chroniques judiciaires sur  France 2. Je prends le téléspectateur par la main et je l’emmène dans une salle d’audience, pour qu’il découvre l’intérieur d’un procès, avec ses moments forts, parfois émouvants. Je poserai les questions qu’un téléspectateur pourrait être amené à se poser devant la séquence : pourquoi le juge prend-il seul la décision ? Quel est le rôle du procureur ? Pourquoi cet homme encourt-il cette peine ? 

Serez-vous seul à commenter ces procès ? 

Je serai avec un avocat et un magistrat, de façon à décoder plus précisément ce qui se passe pendant l’audience. À chaque épisode, les spécialistes seront différents et spécialisés dans la matière que nous traiterons ce jour-là. Je serai le vecteur entre ces experts et les téléspectateurs. Il n’est pas question de refaire le procès ou de juger le travail des juridictions, mais de déchiffrer le fonctionnement de la justice française au travers d’exemples.

Quels effets ou conséquences pensez-vous que cette émission va avoir sur le grand public et sur la perception de la justice ?

Nous espérons que, grâce à cette transparence, la justice soit davantage comprise par les citoyens, puisque, ainsi, on plonge dans une dimension différente, éloignée de ce que nous montrait jusque-là le petit écran — notamment à travers la fiction. Nous voulons permettre aux téléspectateurs d'être les témoins de ce qui se joue, quotidiennement et réellement, dans une salle d’audience, car nous pouvons tous, un jour, être amenés à avoir affaire à la justice. Au-delà de révéler le travail de la justice, les procès découvrent un pan de notre société. 

 

Propos recueillis par Margaux Karp

 


 

Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire

à retrouver ici

Pictogramme francetvpro
Pictogramme Phototélé
Pictogramme France.tv Preview
Pictogramme Instagram france 3