« Au bout c'est la mer » : rencontre avec François Pécheux

À l'occasion de la cinquième saison d'Au bout c'est la mer, nous avons rencontré l'animateur et journaliste François Pécheux. L'occasion de revenir sur ses divers périples ainsi que sur les émotions qu'ils procurent. 

Au bout c'est la mer entame sa 5e saison, quel effet ça vous fait ? 

Un double effet ! 

Il y a évidemment un peu de doute, car après cinq saisons et une vingtaine de fleuves, on finit par se demander si on va encore pouvoir raconter des histoires intéressantes. Fort heureusement, on a de grands fleuves à découvrir : le Yangtsé, le fleuve Amour… Donc nous avons de belles histoires à vivre et à faire vivre. 

Par ailleurs, on se sent beaucoup plus à l’aise avec l’équipe de tournage. On lâche prise et on n’a plus peur de rien ! Nous savons que quoi qu’on puisse vivre, on en tirera quelque chose d'intéressant et de positif. Ça nous donne très envie de continuer. 

D’où vous vient cette passion pour les grands fleuves ? 

Probablement du fait que quand j’étais petit, j’aimais beaucoup aller pêcher dans la Loire avec mon père. J’étais très heureux durant ces moments, mais je ne l’ai réalisé que beaucoup plus tard. Les odeurs de vase, de sable mouillé, de canoë sur la Loire… Tout ça s’est imprégné en moi sans trop que je ne m’en rende compte à l’époque. Et quand on m’a proposé cette émission, tout est ressorti. Il n’y a pas eu un déclic du jour au lendemain, mais plutôt des sensations profondes qui ont coulé en moi depuis que je suis tout petit. 

Y a-t-il un pays qui vous a marqué plus que les autres durant cette saison ? 

Madagascar, car c’était une expérience très personnelle, très intense et absolument unique dans ma vie. Nous sommes partis en expédition en pirogue en autonomie complète pendant cinq jours. Nous étions loin de tout et les conditions de vie ont été très instructives. 

Être bloqués, complètement immobiles, comme dans un sarcophage, sous 42 °C, au rythme du courant, avec juste notre imagination qui pouvait s’échapper dans les nuages... Ça a été une expérience extraordinaire et très introspective ! Je ne me souviens pas m’être ennuyé une seule seconde. 

Évidemment, il y a aussi eu beaucoup de rencontres incroyables, mais l’expérience physique a été particulièrement marquante et je pense qu’elle m’a appris à être zen, à ne pas m’agacer pour rien… Car après une vingtaine d'heures sous 40 °C, je crois que les canicules parisiennes ne vont plus me faire grand-chose [rires]. 

Quel effet ça fait de descendre un fleuve français ? 

Ça va évidemment beaucoup plus vite, car il n’y a pas la barrière de la langue. On peut très rapidement établir des liens et une complicité. 

C’est aussi beaucoup plus pratique pour s’impliquer, car la première chose que je fais lors des rencontres, c’est de demander aux gens : « Comment puis-je vous aider ? »

Je veux pouvoir me rendre utile en faisant à manger, ou un feu, ou bien en pagayant… Et sans la barrière de la langue, c’est évidemment beaucoup plus simple, et très agréable ! 

Est-ce qu’il y a quand même cette sensation de dépaysement quand on est sur un fleuve français ? 

J’avais peur que non, mais au final si, complètement ! J’étais inquiet, car la Loire j’y suis né… Je pensais donc bien la connaître, mais je ne la connaissais au final que sur son cours inférieur. La Haute-Loire est d’une beauté à couper le souffle ! Durant tout mon périple, j’ai été époustouflé par le grandiose et par la beauté des paysages. 

Évidemment, j’ai rencontré des gens qui ne voient pas passer beaucoup de touristes, ce qui rendait ces rencontres très rafraîchissantes. 

Durant cette saison, quelle pratique locale vous a le plus impressionné ?

Il y en a eu deux, au Nicaragua. 

La pêche au tarpon, qui est un poisson énorme – environ deux mètres – qu’on attrape avec un harpon. J’aurais bien aimé vous raconter la pêche dans le détail, mais sur les deux sessions, nous n'avons jamais pu en attraper un [rires].  

Ensuite, j’ai été soufflé par cette petite fille qui allait attraper des iguanes. J’ai beaucoup appris de ce qu’elle savait sur la nature. Elle était tellement à l’aise dans son environnement à seulement 10 ans que je pense qu’elle connaît bien plus de choses sur la nature que la plupart des gens. C’était une véritable leçon de la voir en osmose avec la nature. 

Comment vous sentez-vous une fois sur les flots ? 

Je décroche complètement de tout. Et je me faisais justement la réflexion sur le San Juan (Nicaragua) où les six heures estimées sont devenues douze… Malgré ça, il n’y a pas eu une seconde d’ennui. 

Quand le paysage défile, l’esprit s'évade, l’imagination prend le dessus... Contrairement à ma vie quotidienne où je peux facilement ressentir de l’ennui et où il faut que je comble ça, sur les fleuves, je peux juste rester des heures et des heures à regarder les paysages défiler, sans jamais en éprouver. 

Qu’est-ce que vous préférez pendant vos périples ? 

Ne pas savoir quelle sera la prochaine rencontre ou la prochaine aventure… Évidemment, j’aime les rencontres en tant que telles, mais ce sentiment de ne pas savoir ce qui vient après me plaît beaucoup. 

J’aime aussi beaucoup ces moments privilégiés où on dépose tous nos problèmes pour profiter de l’instant. Ça se fait souvent autour d’un feu ou après avoir mangé. Ce sont les moments suspendus où on commence à réellement discuter avec les gens, et ce sont des moments très précieux. 

Comment se passe un tournage type ? 

De façon très légère, adaptable et réactive. Les gens sont souvent surpris quand j’explique que l’équipe de tournage est composée de seulement deux personnes. On ne peut évidemment pas être quinze pour les séquences en pirogue. 

J’ai la chance de travailler avec des réalisateurs de talent, notamment Stéphane Jobert, un véritable magicien qui parvient à sortir la bonne caméra et le bon son quelles que soient les configurations. 

Il parvient à tout gérer à une vitesse hallucinante ! Nous avons à peine le temps de dire « bonjour » aux locaux que ça tourne déjà, avec tous les plans dont on a besoin (plans larges, plans serrés, drone…). 

Au final, un tournage ressemble à deux personnes qui se connaissent très bien, qui passent beaucoup de temps ensemble, comme un vieux couple, et qui traversent toutes ces aventures ensemble. À nous vient s'ajouter le fixeur-traducteur, qui connaît très bien le pays et nous fait gagner beaucoup de temps. 

Comment préparez-vous vos visites ? 

Il faut jongler entre le fait de préparer et de ne pas trop préparer. Personnellement, ce que j’aime, ce sont les surprises. 

Donc on fait une enquête, on organise les séquences qu’on voudrait tourner, mais on se laisse aussi beaucoup d’espace pour la découverte. Si je ne suis pas surpris par ce que je découvre, les spectateurs ne le sont pas non plus. 

Y a-t-il des fleuves que vous souhaiteriez absolument faire ? 

Il y a évidemment le Nil qui nous tend les bras et sur lequel on pourrait probablement réaliser dix émissions sans difficulté. 

J’aimerais aussi faire le plus beau des films sur le plus petit des fleuves... En France, le plus petit des fleuves s’appelle la Veules et s’écoule sur un peu plus d’un kilomètre. 

Mais, au final, il n’y a pas forcément un fleuve qui m’attire plus qu’un autre… Ce qui est intéressant, ce sont les rencontres et ça, on peut en faire partout. 

Un mot de la fin ? 

Le mot de la fin, c’est le fleuve qui nous le dit : « J’étais là avant, je serai là après et ce n’est jamais fini… » 

Et je pense que quel que soit le fleuve, on peut faire dix fois le même voyage, ce ne sera jamais la même aventure. Les histoires que racontent les fleuves nous dépassent et c’est beaucoup plus profond que ce qu’on pourrait imaginer. 
 

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