POUR UNE FEMME

Pour une femme

Cinéma - Inédit - Jeudi 16 juin à 20.55

La mort de la mère, celle du père. Entre les deux, Diane Kurys interroge son roman familial dans un va-et-vient entre l’immédiat après-guerre et la fin des années 1980. Et effleure quelques secrets enfouis. C’est évanescent et entêtant comme un vieux flacon de parfum (« Pour une femme ») conservé pendant quarante ans. Avec Mélanie Thierry, Benoît Magimel, Sylvie Testud, Clément Sibony...

Sur le générique de début défilent sur un tableau de liège et se mêlent, presque indiscernables, photographies familiales, noms des comédiens, clichés pris sur les tournages de Pour une femme, Diabolo Menthe (c’est du reste la chanson d’Yves Simon que l’on entend), La Baule-les-Pins, Coup de foudre... Le ton est donné. Diane Kurys revient une fois encore sur son roman familial, qui lui avait fourni la matière de quelques-uns de ses films précédents. Et c’est bien une vieille photo en noir et blanc qui lui fournit ce nouveau point de départ. Et d’abord la disparition de la mère de la narratrice qui tient lieu de double romanesque à la réalisatrice. Léna a choisi de mettre fin à ses jours et à ses souffrances. Ses filles Anne (Sylvie Testud) et Tania (Julie Ferrier) se retrouvent pour trier ses souvenirs. Un cliché jauni retrouvé dans une valise... Une enquête. Flash-back.
En 1947, à Lyon, Michel (Benoît Magimel) et Léna (Mélanie Thierry) coulent des jours heureux. Lui, tient un atelier de tailleur et milite à la cellule locale du Parti communiste. Elle, élève leur fille Tania et s’ennuie doucement. Juifs, ils se sont rencontrés au camp de Rivesaltes où ils ont échappé à la déportation en se mariant. Ils viennent de recevoir la nationalité française.
Le quotidien des Korski est troublé par l’arrivée de Jean, le jeune frère de Michel, que l’on présumait mort. D’où vient-il ? De Norvège, comme il le prétend ? D’URSS, comme le pense Maurice (Denis Podalydès), le secrétaire de cellule ? Le mystère et le danger planent sur le jeune homme, bientôt rejoint par son ami Sacha (Clément Sibony), tout aussi trouble que lui. Les deux hommes sont discrets et semblent préparer un assassinat. On n’en sait guère plus. Par petites touches légères et impressionnistes, Kurys évoquent le mélange d’espoir et d’étouffement dans le Lyon de l’immédiat après-guerre, le rapprochement de Léna et Jean — regards, fous rires devant une carpe sautant par la fenêtre pour ne pas être farcie —, les doutes d’une femme tiraillée entre deux frères que tout oppose : la foi simple et inébranlable dans le communisme pour Michel, le désir éperdu de vengeance pour Jean.
Retour à la fin des années 80. Anne effleure — à peine, juste assez — le secret de sa naissance. L’ombre d’un « oncle » qui a disparu une seconde fois pour on ne sait où, mais dont le nom a été donné à une rue de Tel Aviv. Michel, qui ne s’est jamais vraiment remis de son divorce, mais dont l’amour pour Léna est resté intact malgré les années, malgré la mort, est gravement malade. Les sœurs se retrouvent une fois encore pour lui dire au revoir. Kurys évite joliment le pathos. Cherchant une bonne nouvelle à lui apprendre pour lui faire plaisir une dernière fois, Anne et Tania pouffent de rire à l’idée de lui faire croire que les Russes sont de retour à Berlin et reconstruisent le mur…
C’est un roman familial apaisé, en somme, que raconte Kurys. « On grandit tant bien que mal entre les non-dits et les questions sans réponse. Et puis, un jour, on regarde enfin ses parents comme un homme et une femme qu’on aurait croisés dans nos vies et qu’on aurait aimés pour ce qu’ils étaient. »

C.K.G.

Écrit et réalisé par Diane Kurys

Musique de Paul Amar

Avec Mélanie Thierry (Léna), Benoît Magimel (Michel), Nicolas Duvauchelle (Jean), Sylvie Testud (Anne)...

2013

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