© Monika Rittershaus/Opéra national de Paris

AU CLAIR DE LA LUNE - « Rigoletto » de Giuseppe Verdi

jeudi 21 décembre 2017 à 00h20

« Rigoletto » de Giuseppe Verdi
 

Enregistré en avril 2016, à l’Opéra de Paris.

« Oh ! Le Roi s’amuse est le plus grand sujet, et peut-être le plus grand drame des temps modernes. C’est une création digne de Shakespeare ! » Quelques mois avant d’adresser ces mots à Francesco Maria Piave pour le presser de « mettre Venise sens dessus dessous et faire en sorte que la Censure autorise ce sujet » - ce qui n’alla pas sans mal, la moralité ne tardant pas à s’en offusquer -, Verdi travaillait à une adaptation du Roi Lear. Et sans doute est-ce imprégné de la pièce de Shakespeare, son maître vénéré, qu’il lut le drame de Victor Hugo, sentant « comme un éclair, une inspiration » en trouvant sous la plume du Français, à laquelle il devait d’ailleurs le plus grand triomphe de ses « années de galère » avec Ernani, un équivalent au triangle formé par le Roi, sa fille et le fou. Entre le duc, futile, licencieux, et Gilda, victime de l’ignorance dans laquelle elle est retenue prisonnière, se dresse la figure à deux visages du bouffon bossu et du père obsédé par la malédiction. Monstrueux et déchirant, grotesque et sublime, le rôle-titre atteint son apogée dans l’air « Cortigiani, vil razza dannata », dont le mouvement descendant, de l’explosion de rage à l’imploration, affirme la capacité du compositeur à plier une forme héritée du bel canto à la vérité du théâtre.

Placée sous la direction de Nicola Luisotti, cette nouvelle production de Rigoletto marque la première collaboration du metteur en scène Claus Guth avec l’Opéra de Paris.
 

En quelques mots : 

> Un Roi avec divertissement 

Le livret de Rigoletto est inspiré du Roi s’amuse de Victor Hugo, créé en 1832 à la Comédie-Française. Le drame mêle le sublime au grotesque autour du personnage de Triboulet, bouffon du roi, et dénonce à travers le libertinage de François 1erla décadence des classes dirigeantes. On sait l’admiration que Verdi nourrissait pour Hugo ; son librettiste, Piave, avait du reste déjà adapté pour lui une autre pièce : Hernani.

> Un bouffon nommé Triboulet

Le personnage central du drame de Hugo et de l’opéra de Verdi est inspiré de Nicolas Ferrial (1479-1536) alias Triboulet, qui fut bouffon à la cour du roi de France sous les règnes de Louis XII et de François Ier. Ce dernier le bannira pour s’être moqué d’une courtisane. En 1532, Triboulet deviendra l’un des personnages du Pantagruel de Rabelais.

> Censure 

La pièce de Hugo, comme l’opéra de Verdi, fut victime de la censure : dès le lendemain de sa création, Le Roi s’amuse fut interdit tant, sous la Monarchie de Juillet, la critique du pouvoir royal et de la noblesse était sensible. Vingt ans plus tard, à Venise, l’opéra de Verdi devait également passer sous les fourches caudines de l’Empire austro-hongrois : le compositeur et son librettiste se trouvèrent dans l’obligation de transposer l’action en Italie, à la cour de Mantoue, et de modifier sensiblement l’intrigue ainsi que les noms des personnages. Ainsi Triboulet devint Rigoletto.

> Un tournant esthétique 

Verdi s'éloigne avec Rigoletto des canons du bel canto toujours en vigueur à l'époque. S'il sollicite encore la virtuosité pure (en particulier dans l'air de Gilda « Caro nome »), c'est pour l'intégrer à la trame dramatique, pour caractériser un personnage et non plus uniquement pour offrir au spectateur un morceau de beau chant sans rapport avec l'action. Il développe la complexité psychologique des personnages : bouffon odieux, sarcastique et grimacier, Rigoletto est aussi un père sensible, aimant et inquiet. Le chœur est un personnage à part entière de l'action, qui concourt à l'évolution du drame.

> Rigoletto et son double 

Claus Guth s’attache implacablement à mettre à nu les œuvres qu’il met en scène. Pour cette production, il a imaginé un spectacle traversé de fantômes et de fantasmes, où le spectateur revit la tragédie à travers le regard d’un Rigoletto brisé et socialement déclassé. 

 

Melodramma en trois actes (1851) de Giuseppe Verdi
Livret de Francesco Maria Piave
D'après la pièce de Victor Hugo, « Le Roi s'amuse »

Direction musicale : Nicola Luisotti
Mise en scène : Claus Guth
Décors et costumes : Christian Schmidt
Chorégraphie : Teresa Rotemberg
Lumières : Olaf Winter
Dramaturgie : Konrad Kuhn
Vidéo : Andi A. Muller
Chef des Chœurs : José Luis Basso

Orchestre et Chœurs de l’Opéra national de Paris

Michael Fabiano, Le Duc de Mantoue
Quinn Kelsey, Rigoletto
Olga Peretyatko, Gilda
Rafal Siwek, Sparafucile
Vesselina Kasarova, Maddalena
Isabelle Druet, Giovanna
Mikhail Kolelishvili, Le Comte de Monterone
Michal Partyka, Marullo
Christophe Berry, Matteo Borsa
Tiago Matos, Le Comte de Ceprano
Andreea Soare, La Comtesse
Adriana Gonzalez, Le Page du Duc
Florent Mbia, Huissier de la cour

 

Durée : 107’51"


Année : 2016


Réalisation
François Roussillon


Production
François Roussillon et associés
Opéra national de Paris


Direction de la culture
Nicolas Auboyneau


Conseiller de programmes
Brice Chappey

Contact presse

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