Communiqué de presse
Itinéraires

Les invisibles

Mardi 18 novembre 2025 à 20h00
TELEVISION
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C’est une histoire d’ombres.
Pendant longtemps, les personnes en situation de handicap de Wallis-et-Futuna ont été cachées, exclues de la société.
Elles sont restées dissimulées dans les maisons, invisibilisées par une famille qui n’assumait pas le handicap d’un fils, d’un frère, d’une nièce... Par honte, mais aussi par peur d’affronter le regard d’autrui. Car beaucoup de Wallisiens voyaient la naissance d’un enfant handicapé comme le signe d’une malédiction. De nos jours, cette superstition tend à disparaître, mais ce territoire accuse un retard important dans l’acceptation et la prise en charge des personnes en situation de handicap.
C’est aussi une histoire de lumière.
Celle des centaines de Wallisiens et de Futuniens en situation de handicap qui luttent quotidiennement pour devenir enfin visibles. Un combat que nous suivons au quotidien avec quelques-uns d’entre eux. Sosefo, président d’association, milite pour faire reconnaître les droits des personnes en situation de handicap. Noëla a réussi à s’en sortir grâce au handisport et transmet sa passion aujourd’hui. Alofa revient vivre à Futuna après des années passées en Nouvelle-Calédonie et veut montrer l’exemple grâce à l’application TikTok.

QUESTIONS A UX AUTEURS-RÉALISATEURS

Fabien Dubedout : Auteur
Jérôme Roumagne : Réalisateur


Qu’est ce qui vous a poussé à traiter ce sujet ?
Jérôme Roumagne : En tant que réalisateur, j’ai toujours été attiré par les sujets qui donnent la parole à celles et ceux qu’on entend trop peu, que notre société tend à invisibiliser.
Que ce soit à travers les violences intrafamiliales ou les victimes de soumissions chimiques, mon objectif a toujours été de mettre en lumière des réalités souvent ignorées, pour éveiller les consciences et provoquer une réflexion collective. Avec ce projet, c’était une évidence pour moi. J’ai tout de suite senti qu’on pourrait, à notre échelle, aider ceux qui se battent au quotidien pour faire évoluer la considération et la prise en charge du handicap à Wallis-et-Futuna.
Fabien Dubedout : En tant que journaliste, j’ai eu l’occasion d’aborder parfois le sujet du handicap en Nouvelle-Calédonie et une connaissance, un paraplégique originaire de Lifou, m’a fait prendre conscience de la difficulté de vivre dans les îles en tant que personne en situation de handicap. J’ai aussi appris que la maladie était perçue
de manière différente entre les Occidentaux et les Océaniens. Puis on m’a parlé de la situation à Walliset-Futuna. Le constat a été terrible : le manque de reconnaissance, l’absence de prise en charge, le rejet...
La Nouvelle-Calédonie souffre de nombreux retards, mais la situation est encore pire à Wallis-et-Futuna. Il m’a semblé nécessaire d’en parler, mais pas de manière journalistique. La sensibilité et le temps long du documentaire offraient une approche plus appropriée pour évoquer ce sujet à la fois intime et communautaire.

Comment avez-vous réfléchi à la présence des trois protagonistes principaux dans le film ?
F.D. : Sosefo est une personne ressource depuis le début de l’enquête puis de l’écriture du film. Il s’est vite imposé comme un pivot du récit par son implication, son militantisme et son histoire personnelle. Si le handicap est sorti de l’ombre à Wallis et Futuna, c’est en grande partie grâce à lui.
Mais il ne permettait pas d’aborder tous les aspects du sujet. L’histoire de Noela est le triste exemple du manque de personnel soignant et de compétences médicales.
Et son parcours d’athlète handisport apporte un peu de lumière.
Alofa a été une véritable révélation. Son incroyable énergie et sa personnalité permettent d’apporter un souffle inattendu. Elle est aussi un pont entre lesgénérations mais aussi entre la Nouvelle-Calédonie, lieu d’exil médical pour beaucoup, et Wallis-et-Futuna.

Qu’est ce qui vous a le plus touché en écrivant/tournant ce sujet ?
F.D. : Tout d’abord, ce sentiment de rejet et d’impuissance. Les personnes interrogées avant l’écriture finale portent en elles une véritable blessure, qui va bien audelà de leur handicap. Certains témoignages m’ont particulièrement ému. Et aussi révolté parfois. Ce qui m’a touché ensuite, c’est cette volonté farouche chez certains de ne pas se laisser faire, de montrer qu’ils existent. Ce courage m’a impressionné.
J.R : Ce qui m’a le plus touché pendant le tournage, c’est la force, le courage, la résilience et la gentillesse d’Alofa, Noela et Sosefo. Partager le quotidien de ces trois êtres humains m’a bouleversé et m’a donné une leçon de vie que je n’oublierai jamais. Les liens qui se sont tissés pendant ce tournage sont très forts, nous sommes toujours en contact aujourd’hui, et nous prenons régulièrement des nouvelles les uns des autres.

Comment souhaitez-vous que le film résonne auprès de ceux qui le regardent ?
J.R : Ce que je souhaite avant tout, c’est que le film fasse évoluer le regard que l’on porte sur le handicap. J’espère que le film provoquera un électrochoc, qu’il fera naître une prise de conscience sur la manière dont notre société et en particulier celle de Wallis-et-Futuna invisibilise ces personnes. Il est urgent que les institutions wallisiennes s’emparent de cette réalité et rattrapent leur retard. Wallis-et-Futuna fait partie intégrante de la République française : comment accepter que des citoyens français y soient si peu considérés, si peu accompagnés, simplement parce qu’ils vivent loin de l’hexagone ? Chaque institution a un rôle à jouer, et c’est bien toutes ensemble, accompagnées des associations, qu’elles arriveront à faire bouger les lignes.
F.D. : J’espère que le film permettra au spectateur de prendre un instant la place de la personne en situation de handicap. Et de constater que des choses aussi simples que se laver, se déplacer, faire ses courses, etc., sont une terrible épreuve pour eux. Et ensuite, se demander pourquoi ?

REALISATEUR : Jérôme Roumagne
AUTEUR : Fabien Dubedout (en collaboration avec Aurélie Macedo)
PRODUCTRICE : Catherine Marconnet
Une production Archipel Production
avec la participation de France Télévisions
Avec le soutien : du FSAC NC, du CNC, de la PROCIREP-SOCIÉTÉ DES AUTEURS et de l’ANGOA
Année : 2025
Durée : 52’ min