Business moines : du pain béni pour les abbayes

« Est-ce que je pensais être patronne d’entreprise quand je suis entrée au monastère ? Sûrement pas… » confesse mère Pascale, de l’abbaye de Chantelle, en Auvergne. Pourtant, cette abbesse gère une société qui crée, fabrique et commercialise des cosmétiques. La PME emploie douze salariés, expédie des produits dans toute la France grâce à sa boutique en ligne et réalise 1 million d’euros de chiffre d’affaires par an. Une ressource nécessaire à la survie des bénédictines et à l’entretien des bâtiments, classés monuments historiques. Pour élargir leur clientèle et toucher de nouveaux publics, les moniales de Chantelle ont créé leur page Facebook.

À Igny, en Champagne, les sœurs cisterciennes de l’abbaye ont, elles aussi, choisi de s’ouvrir vers l’extérieur. Car, avoue sœur Madeleine : « On ne peut pas vivre d’amour et d’eau fraîche, même avec la prière. » Renommées pour leurs bouchons en chocolat, elles viennent de recruter Frédéric Lefèvre, ancien champion de France du dessert. L’objectif ? Innover, pour augmenter le chiffre d’affaires annuel, qui stagne à 300 000 euros.

En Alsace, les moines trappistes de l’abbaye d’Œlenberg ont décidé de se tourner vers la grande distribution afin de doper leurs ventes, malgré un chiffre d’affaires record de 1,8 million d’euros en 2015. De moins en moins nombreux à pouvoir travailler, ils emploient quatorze laïcs qui confectionnent une farine de qualité et ses produits dérivés. Mais les recettes du magasin de l’abbaye, modèle de réussite pour les autres communautés, ne suffissent pas à payer les travaux du monument de 20 000 mètres carrés.

Leurs confrères bourguignons de Cîteaux ont trouvé l’équilibre entre business et vie monastique. Ne travaillant que trois jours par semaine, ils fabriquent un fromage d’exception avec le lait des 75 vaches qui paissent dans les pâturages de l’abbaye. Seuls 120 000 trappes de Cîteaux sortent chaque année de la fromagerie. Une rareté qui en a fait un produit de luxe recherché par les connaisseurs et, pour les moines, une bénédiction.

Amandine Deroubaix