Marion, 13 ans pour toujours
Les fictions du réel

Marion, 13 ans pour toujours

Fiction - Inédit - Mardi 27 septembre à 20.55

Marion Fraisse avait 13 ans quand elle s’est pendue, en février 2013. À côté d’elle, comme un symbole : son téléphone portable. Et une lettre, dans laquelle la jeune file s’adresse directement à ses camarades de classe qui l’ont harcelée. Atteinte au plus profond d’elle-même par ce drame, sa mère Nora a écrit un récit bouleversant dont ce film, Marion, 13 ans pour toujours, est l'adaptation.

Cette fiction sociétale est la première d'une série lancée par France 3 cette saison autour de sujets forts, fictions sociétales qui seront suivies de débats animés par Carole Gaessler. 

Dans le dossier de presse (lien ci-contre) du film, vous pourrez retrouver l'important dispositif déployé par France 3 et France Télévisions autour du harcèlement scolaire et du cyber-harcèlement, mais aussi les interviews du réalisateur Bourlem Guerdjou, des comédiennes Julie Gayet et Luàna Bajrami ainsi que celle de Nora Fraisse. Car, aujourd'hui, la mère de Marion poursuit son engagement pour sensibiliser et informer. Elle nous explique comment.

Quelles définitions donneriez-vous du harcèlement scolaire comme du cyber-harcèlement ?
Nora Fraisse : Je ne fais plus de distingo entre harcèlement à l’école et cyber-harcèlement. Un harcèlement entre pairs, c’est-à-dire entre élèves, peut avoir lieu dans ou devant l’école, en cours ou durant les activités périscolaires, dans le bus, par téléphone ou sur les réseaux sociaux. C’est simplement le lieu et le vecteur qui change. Aujourd’hui, à partir du CM2, dès que l’enfant détient son propre smartphone, il n’y a plus de harcèlement scolaire sans cyber-harcèlement. Outre l'accès aux réseaux sociaux, l’usage du smartphone permet d’utiliser les applications, les messageries, la caméra vidéo et l’appareil photo. Pour un harceleur, c’est un véritable couteau suisse. Le harcelé est encore plus fragilisé.

En vous rendant dans des écoles, quel accueil avez-vous reçu des élèves ?
N. F. : J’ai vécu une année d’interventions dans des établissements scolaires extrêmement difficiles. Il y a eu beaucoup d’échanges. Certains élèves sont très fermés, mais la plupart sont demandeurs. C’est l’occasion pour les victimes que l’on parle d’elles sans les nommer. De rappeler aussi le rôle primordial des témoins, capables de déjouer le harcèlement. Quant au harcèlement sur les réseaux sociaux, j’ai senti un tournant dans l’appréhension qu’en ont les lycéens. À ceux qui, par exemple, me lançaient : « Alors, pour vous, la solution serait de jeter nos smartphones ? », je répondais : « Non, pas du tout, je vous demande d’en avoir un usage raisonné, de ne pas harceler, et si vous êtes victime d'un harceleur, d’écouter les moyens qui permettent de s'en libérer. On peut, on doit, vivre et grandir dans la bienveillance et la bientraitance. »

Et du côté des adultes ?
N. F. : Bien qu’il existe encore des responsables d’établissement qui en nient l’existence, je maintiens que le harcèlement scolaire est un combat de sécurité publique qui nécessite l’ouverture de centres d’accueil et, surtout, la mise en place d'une formation des professeurs, des encadrants pédagogiques, des encadrants d'activités périscolaires, des représentants des parents d’élèves, sans oublier, bien sûr, les médecins et les infirmières.
Au sein de l’école, il nous faut aussi repenser les zones où les agresseurs peuvent agir à l’abri des regards, que cela soit dans les toilettes ou les vestiaires.

Quelles principales mesures attendez-vous aujourd’hui ?
N. F. : Avec les membres de mon association « Marion, la main tendue », nous avons souvent l’impression de crier dans le désert. Dans notre pays, il y a près de 64 000 établissements scolaires qui accueillent quelque douze millions d’élèves. Avec la meilleure volonté du monde, on ne peut pas intervenir dans plus de six établissements par mois et informer plus d'un millier d'élèves… J’aimerais que d’autres prennent la relève, mais les moyens nous manquent cruellement. Nous voudrions une vraie réaction des pouvoirs publics, des actions interministérielles et l’application de la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l’école publique de 2013, qui oblige chaque établissement scolaire à sensibiliser les jeunes aux conséquences du harcèlement. Les chiffres émanant de l’Éducation nationale sont éloquents : un enfant harcelé a quatre fois plus de risques de faire une tentative de suicide. En tant qu’adultes citoyens, doit-on laisser faire ou doit-on réagir ?

 

Propos recueillis par Sylvie Tournier

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