LES DERACINES, L'EUROPE EN 45
La Case du siècle

Les Déracinés – L’Europe en 45

Documentaire - Dimanche 22 mai 2016 à 22.25

Le 8 mai 1945, l’Europe, exsangue, célèbre la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais, après l’euphorie de la victoire, la paix retrouvée va signifier, pour quinze millions d’hommes, de femmes et d’enfants, exil et déracinement. À travers le témoignage de plusieurs d’entre eux, ce documentaire dévoile un pan d’histoire méconnu.

En février 1945, l’Allemagne nazie n’a toujours pas capitulé, mais pour les Alliés la victoire semble désormais acquise. Depuis l’été précédent, l’armée du Reich recule partout. Le débarquement a déjà eu lieu en Normandie et l’Ukraine et la Pologne ont été en partie libérées par les Soviétiques. Le conflit n’est pas encore terminé qu’à Yalta, sur les bords de la mer Noire, l’avenir de l’Europe est en train de se décider. Churchill et Roosevelt négocient avec Staline les frontières de l’après-guerre. En position de force sur le plan militaire, ce dernier entend bien agrandir son pays vers l’ouest aux dépens de ses voisins polonais et ukrainiens, qui seront les principales victimes de cette entente.

Un transfert de population sans précédent

Entérinés à la conférence de Potsdam en août 1945, les accords de Yalta vont entraîner le plus grand déplacement de l’histoire. Afin de préserver les générations futures d’autres conflits, les responsables alliés décident de créer des États ethniquement homogènes. Pour Staline, « le problème des nationalités n’est qu’un problème de transport ». Mais Churchill lui-même déclare alors : « L’expulsion est la solution la plus satisfaisante (pour mettre) fin à ces mélanges de populations qui sont la source de problèmes sans fin. »

À l’intérieur des nouvelles frontières, plus de quinze millions de personnes seront ainsi chassées de leur terre natale et contraintes à l’exil. Alors que l’on vient de combattre, cinq ans durant, le régime nazi, aucune voix ne s’élève pour dénoncer le nettoyage ethnique qui se déroule de surcroît dans un climat de vengeance et de violence à l’est de l’Europe. Soixante-dix ans après Yalta et Potsdam, force est de constater que ces déplacements dramatiques sont loin d’avoir résolu les problèmes des peuples sur le Vieux Continent.

Beatriz Loiseau

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Verbatim

Helena Ozonkowa, Polonaise, 13 ans en 1945 : « Pour nous, la Libération, c’était l’arrivée d’une armée étrangère très hostile. Nous considérions que c’était une occupation. »

 

Arno Surminski, Allemand de Prusse-Orientale, 10 ans : « Les troupes russes sont arrivées. Le NKVD, la police politique, a emmené d’abord mon père. Deux jours plus tard, ils sont venus chercher ma mère, et moi je suis resté tout seul. C’est ainsi que je suis devenu orphelin. »

« Nous étions coupés du monde […]. Ce qui importait, c’était de trouver à manger pour survivre. On s’en fichait d’être des Allemands en Russie ou en Pologne… »

 

Erika Morgenstern, Allemande de Prusse-Orientale, 6 ans : « La guerre était terminée, mais la souffrance, pour la population civile, c’est là qu’elle a véritablement commencé. Nous avions tout perdu. »

« La ville est devenue totalement russe. Nous, les Allemands, n’existions plus. Envoyés dans un camp de travail, nous étions tous des esclaves, des travailleurs forcés ; nous n’avions plus aucun droit. »

 

Hellmuth Karasek, Allemand, 10 ans : « Après la capitulation […] c’était l’époque de l’anarchie absolue. Il n’y avait plus de téléphone, plus de courrier, plus d’argent, pas de gouvernement, pas de radio, pas d’école, rien. »

 

Adolf Juzwenko, Polonais d’Ukraine, 9 ans : « En tant que victimes de l’histoire, nous en voulions réellement à l’Occident. Les Polonais ont payé un prix très lourd (à la guerre), et pour quel résultat ? Devenir un satellite de l’URSS et un État dont les frontières ont été déplacées arbitrairement. »

 

Zygmunt Sobolewski, Polonais d’Ukraine, 14 ans : « Nous n’étions pas des rapatriés, non. On était chassés de nos terres comme les Allemands des leurs. »

 

Irene Mystal, Ukrainienne de Pologne, 7 ans : « Les soldats (polonais) nous ont donné deux heures pour prendre nos affaires et partir. »

LES DERACINES, L'EUROPE EN 45

Documentaire

Durée 52 min

Auteurs-réalisateurs Philippe Picard et Jérôme Lambert

Production Kuiv Productions, avec la participation de France Télévisions et de Planète +

Année 2015

 

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