Fais pas ci, fais pas ça

« Qu'il est difficile de finir, finir en beauté. J'espère qu'on se dira tous, plus tard, que l'on a fini cette aventure en beauté, sans aucun regret, mais avec nostalgie. Je m'imagine interviewé, à 80 ans passés, sur un vieux canapé, raconter à qui veut l'entendre que j'y étais et que j'ai côtoyé des gens formidables. Je les ai tous aimés… Je vous embrasse et ce n'est pas une formule. »

Ces quelques mots, inscrits sur la feuille de service du 29 septembre 2016, sont ceux de Michel Leclerc, le réalisateur et scénariste des deux derniers épisodes de la série. Empreints de tendresse et de nostalgie, ils donnent le ton du grand final de Fais pas ci, fais pas ça où, traversant les années, les familles Lepic et Bouley, plus complices que jamais, se retrouvent en 2027. Le temps a passé, c’est l’heure du bilan, des souvenirs, des confidences, et l’occasion de rattraper certains actes manqués.
Mais pour l’heure, ces mots annoncent la couleur d’une journée bien particulière. C’est en effet aujourd’hui le dernier jour de tournage de Fais pas ci, fais pas ça. Car, oui, après neuf ans de bons et loyaux services, et après nous avoir fait tant rire et parfois pleurer, les Bouley et les Lepic tirent aujourd’hui leur révérence. La tête haute. « C’est agréable de finir une série en le choisissant, en l’assumant et en l’écrivant, explique Guillaume Renouil, producteur. Les enfants ont grandi. Il est normal que cette série – centrée sur la famille et l’éducation – en tienne compte et les laisse voler de leurs propres ailes… » En coulisses, dans les couloirs du cinéma de Sèvres, l’équipe technique s’affaire pendant que les comédiens se préparent. La routine d’un tournage… Mais le trouble est bien palpable. Un tourbillon d’émotions souffle sur le plateau. Drôle de moment. Yaniss Lespert regarde dans le rétroviseur : « C’était le casting à ne surtout pas rater », s’amuse-t-il. « Celui qui m’a apporté une seconde famille ». Même constat pour Tiphaine Haas, sa sœur de fiction : « J’ai grandi avec le personnage de Soline. Elle m’a apporté une grande stabilité quand j’étais plus jeune. Et aujourd’hui, elle n’est pas prête de me quitter. » Côté parents, on sourit, les yeux brillants. Guillaume de Tonquédec et Bruno Salomone, les cheveux gris (un petit coup de vieux scénaristique), s’apprêtent à retrouver une toute dernière fois Renaud et Denis. Pour Michel Leclerc, la pression est énorme. Il veut surtout « ne pas décevoir » le public, certes, mais aussi les comédiens pour qui une page de vie est en train de se tourner. L’heure du tournage de la dernière scène a sonné. L’ultime plan sera aussi le dernier de la série. Double clap de fin, double dose d’émotion. Dans la salle de cinéma, techniciens, réalisateurs, scénaristes, comédiens et guests prennent place. Tous ceux qui ont œuvré, devant et derrière la caméra, à ces neuf années de succès ont été conviés. La dernière image de la série prend des airs de photo de famille, celle de la grande tribu Fais pas ci. Sur scène, devant l’écran blanc et face à une salle comble, Michel Leclerc, ému, donne ses dernières directions : «  Il y a dans ce qu’on va vous montrer quelque chose qui, je pense, n’est pas évident pour vous à gérer. Vos réactions doivent être exactement comme vous le sentez... ». Le secret a été bien gardé, personne ne sait ce qui va être projeté. Les lumières s’éteignent. Moteur. Action. Dans la pénombre, les caméras saisissent les réactions spontanées des comédiens. Quelques minutes plus tard, Michel Leclerc annonce, presque timidement, rien de moins que la fin de la série. Concert d’embrassades et de câlins. L’émotion de la réalité rejoint celle de la fiction.
Au point que ce sont ces images qui illustrent le générique de fin de la série.

Cyrille Latour et Céline Boidin-Lounis