Infrarouge
Documentaire - Inédit - Mardi 17 octobre à 23.15
Depuis 2006, les documentaires de France 2 observent notre monde et ses mutations en caméra « Infrarouge ». Ce regard a désormais un visage : celui de Marie Drucker. Journaliste, animatrice mais également réalisatrice et productrice de documentaires, elle était toute désignée pour incarner « cet espace de liberté et de réflexion hebdomadaire unique ». Rencontre.
Comment avez-vous réagi en vous voyant confier cette nouvelle mission ?
J’ai bien entendu été très heureuse ! J’ai quitté la rédaction il y a un an pour me consacrer à la présentation de magazines comme Retour aux sources mais aussi à l’écriture, à la réalisation et à la production, à travers ma société No School Productions. C’est donc formidable de pouvoir « incarner » ce grand espace dédié au film documentaire qu’est « Infrarouge » !
Vos documentaires de société ont fait ou feront partie d’« Infrarouge », comme Détenues ou Le Courage de grandir. En quoi ce travail s’inscrit-il dans votre démarche professionnelle (notamment issue du journalisme) ?
À l’origine, je viens du reportage. J’ai été JRI, j’ai fait du montage... J’ai toujours eu une passion pour l’image. Depuis quelques années, je sentais le besoin et l’envie d’y revenir mais aussi d’aller davantage vers la création. Je réalise en ce moment mon quatrième film documentaire pour France 2, toujours dans une démarche humaniste autour de sujets de société susceptibles de trouver un écho en chacun d'entre nous. En ce sens, rejoindre « Infrarouge » est parfaitement cohérent !
Depuis sa création en 2006, la case « Infrarouge » n’a jamais eu de présentateur (contrairement à la case précédente, « Contre-courant », dont les documentaires étaient introduits par Stéphane Paoli). En quoi va consister votre rôle ?
Je vais, effectivement... présenter ! C’est-à-dire donner envie aux téléspectateurs de s’intéresser à des histoires qui me passionnent, les guider. Régulièrement, nous prolongerons le film avec un débat avec deux ou trois invités.
Que peut, que doit, le documentaire sur notre époque, notre histoire, nos questionnements ? Et qu’est-ce qui fait, en cela, la spécificité de la programmation « Infrarouge » ?
Le documentaire est une fenêtre sur le monde, sur notre société, sur nous. Le regard nécessairement subjectif des réalisateurs éclaire ce monde de manière à faire naître des questions, des réflexions, des débats. La spécificité d’« Infrarouge » est son ouverture sur tous les sujets, tous les regards sans snobisme ni tabous. Cet espace de liberté et de réflexion hebdomadaire est unique. Cela fait partie des missions de service public.
Quel sens donnez-vous au terme « Infrarouge » ?
Plus qu’un excellent titre, c’est une marque ! Déjà bien connue des téléspectateurs ! J’hérite d’un « label », d’un style, d’une histoire que nous allons continuer de porter avec toute l’équipe ainsi qu’avec les auteurs et réalisateurs qui, chaque semaine, nous font partager leur regard sur notre société et notre histoire. Je mesure ma chance !
Propos recueillis par Cyrille Latour
Il devrait être interdit à certains hommes, comme Jacques Prévert, de disparaître. Mais est-il véritablement parti ? L'auteur, parolier, scénariste aurait eu 117 ans cette année, un âge très raisonnable pour un poète...
En chacun de nous vagabonde un poème de Prévert. Il réapparaît au hasard d’un air fredonné, d’un film évoqué ou d’un devoir d’enfant. Ému, le comédien Gaël Giraudeau explique : « Parmi les poètes dont on se souvient, on va d’abord citer Prévert. » Lui et de nombreux autres artistes ont participé, le 20 mars dernier, au Bouffes du Nord, à un concert pour rendre hommage au poète. Babx, Camélia Jordana, Thomas Fersen Cyril Mokaiesh, L. (Raphaële Lannadère), se retrouvent au fil de ce documentaire Prévert, l'homme de parole(s), écrit par Claire Davanture et réalisé par Philippe Béziat, pour livrer des témoignages émouvants, entre nostalgie pour l'époque du poète et admiration pour la modernité des mots du parolier. On découvre aussi l'influence de Prévert sur les artistes urbains Madame et C215 : « Il s’est affranchi des catégories et des dogmes pour aller vers un art qui soit accessible. C’est vraiment ça qui me touche le plus chez lui », s’émerveille ce dernier. Leurs interventions émaillent la biographie richement illustrée de documents d’époque de celui qui détestait l’école et qui apprit à lire grâce aux contes pour enfants.
Jacques Prévert lui-même évoque en voix off son expérience d’écolier et sa vie de famille : « Nous, quand on était petits, on allait au cinéma. On mangeait à crédit mais on allait au cinéma. Toute la famille aimait le cinéma ! » Des interviews et des reportages anciens sont projetés sur les murs de sa ville adorée, Paris. Comme si, au détour d’une rue, on pouvait encore apercevoir sa silhouette cheminer. Ces extraits le révèlent avec ses amis, Marcel Duhamel, Yves Tanguy, et bien d’autres… La magie de la télévision permet, grâce à l’Ina, de revoir aussi ceux d’autrefois, récemment ou depuis longtemps disparus, comme Jeanne Moreau, Serge Reggiani, Arletty, ou encore Raymond Bussières : « On a créé un groupe de théâtre, Octobre, pour faire la révolution (...). J’appelais Jacques Prévert pour lui dire “Il y a une grève chez Citroën à 14 heures” et, à 20 heures, on le (le texte, NDLR) donnait devant les ouvriers. » La révolte du poète résonne fort dans ses textes, mais le cinéphile nous a aussi laissé de merveilleux scénarios, dont Le Quai des brumes (Marcel Carné), Le Crime de Monsieur Lange (Jean Renoir), Drôle de drame (Marcel Carné), Les Enfants du paradis (Marcel Carné), Notre-dame de Paris (Jean Delannoy). Les images de ces chefs-d’œuvre se reflètent sur les quais de Seine et font rêver les passants.
En avril 1977, il y a tout juste quarante ans, Jacques Prévert s’en est allé : « Quand la vie a fini de jouer, la mort remet tout en place », disait-il. Ses textes et ses poèmes jouent toujours dans nos têtes et il serait tellement dommage de les remettre en place.
Diane Ermel
